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Et l’amour humain ordinaire ?

Et l’amour humain ordinaire ?

Je vais continuer à nommer cette attirance humaine ordinaire faite de projections positives au début, puis négatives après, « l’amour humain » puisque c’est sous cette dénomination que l’on en parle. Ici, je vais focaliser mon propos sur la relation de couple bien qu’il soit évident que ce qui se joue d’une manière puissante dans le couple se joue aussi dans toutes les autres relations, y compris la relation avec soi.

Compte tenu de ce qui a été dit dans les 2 articles précédents ( la limite de l’attirance humaine ordinaire et ses conséquences, l’amour des maîtres), faut-il renoncer à l’amour humain ?

La réponse est dans la question.

Pourquoi, malgré ses souffrances et ses frustrations, malgré ce que l’on pourrait nommer une vision très négative de la réalité, la relation de couple ou la relation amoureuse reste, me semble-t-il, importante pour nous qui cherchons à évoluer, à ouvrir notre cœur et à aller vers la lumière ?

« A qui te frappe sur une joue, présente encore l’autre. A qui te prend ton manteau, ne refuse pas ta tunique. A quiconque te demande, donne, et à qui te prend ton bien, ne le réclame pas. Et comme vous voulez que les hommes agissent envers vous, agissez de même envers eux. »*

Je pense n’étonner personne en affirmant que le couple est le lieu où je vis l’autre comme me frappant sans arrêt sur une joue et me demandant sans cesse de donner.

Le couple est le lieu même où nous sommes en permanence mis au défi de nous conformer aux exigences du chemin.

Si mon meilleur ami a tendance à me frapper sur la joue, à un moment je peux choisir de moins le voir en attendant que ça se tasse . C’est confortable et possible étant donné que je ne vis pas avec lui.

Mais si la femme ou l’homme qui partage ma vie me frappe sur la joue, je n’ai que peu de choix : soit je l’ignore et je laisse pourrir la relation, soit je riposte, soit je pratique si mon intention est d’évoluer et de grandir.

D’où le caractère précieux de la relation de couple quand j’accède à un enseignement sacré et que je suis motivé(e) par l’ouverture du cœur.

La question des pratiques et de l’habileté avec soi se posent réellement dans ce cas.**

Oui, que veut dire vraiment « tendre l’autre joue », « donner sa tunique », ne pas réclamer son bien » ? Et comment agir ainsi sans disparaître dans la relation, sans devenir serpillière ?

« ….. c’est dans la perspective de la Voie que j’envisage la relation de l’époux et de l’épouse. C’est d’ailleurs seulement dans cette perspective que l’union d’un homme et d’une femme peut prendre son véritable sens, chacun aidant l’autre à progresser. »***

L’autre m’aide à progresser certes, de manière acceptable, par les échanges, par l’aide, etc…. Néanmoins il m’aide aussi à progresser par les frustrations et les souffrances qu’il me fait vivre. En ce sens, il m’oblige à mettre en pratique les enseignements des maîtres et cela est plus difficile à voir et à intégrer.

Pour le chercheur de Vérité, c’est fondamental de vivre la relation de couple dans cette vigilance et non dans l’espoir que le couple soit un lieu où les frustrations et les manques de l’enfance soient comblés.

De même, le Christ nous enjoint de pardonner non pas « jusqu’à sept fois, mais jusqu’à soixante dix-sept fois ».

Là aussi, il s’agit de comprendre le sens du mot « pardon » comme n’étant pas fait de condescendance, d’un supérieur vers un inférieur. Il s’agit de « tendre l’autre joue » qui veut dire ne pas entrer dans la réaction mais comprendre l’autre et les blessures qui l’ont amené à nous blesser.

« Le vrai amour n’est possible qu’avec une vraie compréhension. »****

Oui, vous avez bien compris, contrairement à la culture et la civilisation qui nous ont fait croire qu’avec le couple, tous nos problèmes affectifs disparaîtraient, ce lieu révèle toutes nos demandes infantiles et nous donne l’opportunité de nous exercer pour notre maturation intérieure.

Aucun autre intérêt !

C’est un lieu privilégié pour sortir de notre toute-puissance et du désir de posséder l’autre, de nous décentrer de notre monde, d’essayer de comprendre les réactions de l’autre et d’envisager les situations non plus sous l’angle ordinaire de « c’est juste, ce n’est pas juste » mais selon la perspective ultime.

« Celui qui s’est engagé sur la Voie ne veut plus se mentir. Il ne cherche plus à transformer l’autre pour éviter de se transformer lui-même, à faire de l’autre ce qu’il n’est pas arrivé à faire de lui-même. A la fois, il reconnaît sa nullité et il est décidé à guérir coûte que coûte. »*****

Et en même temps, Arnaud nous promet que « si nous n’avons plus besoin d’être aimés pour nous sentir être et pour échapper à la peur, l’amour, l’amour humain nous est donné par surcroît. ….. Vous aurez aussi accès à cet amour humain dont tant rêvent et que si peu découvrent vraiment. Le chemin de la Vérité n’est pas seulement austérité ! Be happy. Soyez heureux. »******

« En effet, qui veut sauver sa vie, la perdra ; mais qui perd sa vie à cause de moi, l’assurera. »*******

*Luc 6, 26-31

**Je me souviens vous avoir promis d'écrire sur les pratiques permettant d'aimer, soi et l'autre. Promis, ce sera fait dans le prochain article.

*** Arnaud DESJARDINS, Les chemins de la sagesse, tome 2, Ed. La Table Ronde, 1972, p.192

****THICH NHAT Hanh, Bouddha vivant, Christ vivant, édit. Lattès, 1996, p.89

*****Arnaud DESJARDINS, idem, p.194

*****Arnaud DESJARDINS, Pour une vie réussie, un amour réussi, Ed. La Table Ronde, 1985, p.251

*******Mat., 16,25

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