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L’exercice
(4ème partie)

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1er exercice : Aucun refus (suite)

Vivre au présent

Nous vivons emprisonnés dans les blessures du passé ou dans la nostalgie des jours heureux. Nous nous projetons aussi dans l’avenir, vivant dans l’espoir que quelque chose de meilleur nous arrive ou dans la peur qu’une souffrance nous tombe dessus.

Autrement dit, nous vivons dans le refus du présent tel qu’il est. Nous le refusons quand il est souffrant et le comparons avec un passé plus ou moins heureux ou malheureux, dans l’attente des jours meilleurs. Le refus existe dans cette posture implicite : « Cela ne devrait pas être ainsi. Je ne devrais pas souffrir comme j’ai souffert il y a un an ! »

Nous le refusons aussi quand il nous comble et cela est plus difficile à entendre. Nous le refusons quand nous avons peur qu’il se termine, ou que nous faisons tout ce que nous pouvons pour qu’il dure. Nous nous disons aussi : « Cela ne devrait pas être ainsi ! Je ne devrais pas être heureux comme ça ! » Sinon, au milieu d’un grand bonheur, nous n’aurions pas si peur qu’un caillou vienne faire gripper la machine.

Je viens de me séparer de mon mari, je rencontre un homme dont je tombe follement amoureuse, je nage dans le bonheur. A la première grande dispute, l’angoisse et les doutes remontent. « Est-ce que cette relation va être aussi souffrante que la précédente ? »

Observez-vous ! Je me suis vue faire cela combien de fois !

Voilà notre malheur ! Voilà la prison ! Toujours dans le passé ou dans le futur ! Jamais au présent ! En quoi vivre pleinement au présent qui veut dire vivre dans l’acceptation totale du présent tel qu’il est, sans aucune pensée du refus, participe-t-il à nous sortir de cette prison de souffrance ?

Rappelons – ce n’est jamais superflu de le faire – qu’accepter ne veut pas dire se résigner. J’accepte l’instant présent tel qu’il est et je change ce que je peux changer de la situation. Concernant ce que je ne peux pas changer, d’instant en instant, j’accepte les situations qui arrivent telles qu’elles sont.

Je sais par expérience que cet exercice est difficile car il exige de nous de sortir de notre manière habituelle de fonctionner et de penser.

Nous sommes tellement préoccupés par cette question du « quand ».

« Quand est-ce-que je réussirai mon installation professionnelle et que financièrement, cela ira mieux ? »

« Quand est-ce que notre petite fille sera propre et qu’on n’aura plus à se soucier si elle est dans les normes ou non ? »

Observez-vous !

Vivre là où je suis

Vivre au présent implique aussi vivre là où je suis.

La préoccupation de notre réelle place au monde est légitime. Malheureusement, elle est déclinée de manière tellement erronée.

La recherche de la place qui correspond à nos potentialités ne doit pas nous aveugler et nous empêcher de nous incliner devant la réalité : pour l’instant, je travaille sur un poste qui ne me convient pas. D’accord ! Cependant, si je suis à cet endroit, eh bien, c’est ma place actuelle et il n’y a pas une autre place en ce qui me concerne.

Non pas : « Je devrais être ailleurs. » Mais plutôt : «C’est là où je suis. C’est donc ma place actuelle dans l’instant présent. » Rien ne m’empêche, en même temps, de rechercher un autre poste. Et, tant qu’un autre poste ne se présente pas, je me mets en paix avec la situation.

Et cette pratique est difficile car nous sommes tellement persuadés que nous devons changer ce qui ne nous convient pas si nous voulons être heureux.

Les enseignements traditionnels pointent vers cette nécessité de revenir à soi et à l’instant présent.

« La nouvelle était, d’abord, que Dieu était ici, maintenant. » *

«  Rien à croire, rien à espérer. Pas d’autre salut que de vivre, pas d’autre salut que d’aimer: le royaume, c’est ici-bas; l’éternité, c’est maintenant. »**

Dans le prochain article, je développerai le pourquoi de cette nécessité et la pratique qui en découle.

*C.H. DODD, Le fondateur du christianisme , édit. du Seuil, 1972, p.64

**André COMTE-SPONVILLE, Impromptus, PUF, 1996, p. 184

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